Les enfants du Grands Loups Blancs

Dans sa demeure insulaire, sombre et mystérieuse, Morgenkriss cherchait, expérimentait, priait avec acharnement des entités inconnues et des magies qu’elle commençait à peine à découvrir mais qui lui étaient soufflée à la fois pas les lieux, par les murmures de son dieux et par quelques réminiscences d’un passé lointain dont elle ne se souvenait plus. Peut-être aussi que d’autres forces innommables la poussait à utiliser certaines formules ésotériques, mais peu importe. Ce qui compte est le but et celui-ci était simple : Ramener ses petits dans ces terres. Ne cherchez pas à savoir pourquoi car Morgenkriss ne le dira pour rien au monde.

Seul au fond de sa demeure, Morgenkriss ne se relâchait pas. Qu'avait-elle d'autre à faire sinon de persévérer ? Quelque chose la poussait, une volonté qui lui venait de l'intérieur, une voix qui lui soufflait ces mots : dévotion, ténacité, désir. Dévotion pour sa cause, ses petits, son dieu. Ténacité car on arrive jamais à un but en abandonnant en chemin. Désir car c'est lui qui permet de ne pas oublier pourquoi on agit. Sans désir, la prière n'a aucune force. Déjà, l'un d'eux prenait forme mais la fatigue, à chaque fois, empêchait la matérialisation d'aboutir. Alors Morgenkriss eut une idée : La douleur. Elle seule pourrait l'empêcher de s'endormir et permettrait à son expérience d'arriver à son terme.

Utiliser le pouvoir de la faux. Elle se procura un clou arraché à une vieille table puis elle monta sur le toit, se dévêtit entièrement et s'agenouilla près de l'énorme croc planté là, face à la lune. Elle commença ses prières, demandant à la lune et à son dieu de lui envoyer ses petits. Quand la fatigue se fit sentir, elle prit le clou et se l'enfonça avec rage dans la cuisse, poussant un hurlement de douleur. Des formes commençaient à bouger en bas du manoir. Quand la douleur du clou devenait insuffisante, elle le faisait tourner dans la plaie pour la renforcer. Non seulement la douleur l'empêchait de s'endormir, mais elle décuplait la force de ses prières. Les formes noires en bas devenaient plus précises.

Dans le fond de son jardin, derrière sa maison de l’île qu’elle occupe, Morgenkriss tournait autour de la rune qu’elle avait tracée au sol. Elle s’était mise à briller dès qu’elle eut placer le dernier trait. Cette rune, elle l’avait vue en rêve mais elle n’avait pas obtenu son mode d’emploi. Y en avait-il un ? Alors elle inventait. Elle tournait autour, priait la Grand Loup Blanc de l’aider à comprendre, cherchait dans les ombres, tournait encore...

La rune lui avait permise de faire passer quelques loups noirs du Bois Sombres mais quelle était l’étendu de ces réels pouvoirs ? Ce qu’elle voulait, c’était que les apparitions qui rôdaient autour de son domaine puissent acquérir un peu de réalité. Des worgens, de vrais worgens en chair et en os, quoi de mieux pour fonder son petit royaume ? Et elle sentait que la lune avait une influence sur tout cela. La rune brillait plus fort la nuit, quand la lune était haute et pleine, au dessus de sa tête.

Les jours se succèdent, identiques les uns aux autres. Rien ne venait troubler la routine et cela lui était insupportable. Alors qu’elle venait de redescendre du toit de sa maison, Blanche croisa la pâle apparition d’un magnifique spécimen mâle de sa race. Une étrange et silencieuse discussion s’ensuivit et quelques jours plus tard, à la suite d’une longue chasse qui expédia un bon nombre d’animaux de Hautebrande dans l’autre monde, Blanche remonta sur le toit de sa maison pour y déposer un certains nombre d’Offrandes. Il y avait :
- Dix peaux de lapin
- Dix Coeurs de biche
- Vingt yeux de biche
- Dix viscères d’ours
- Un grand os d’ours
- Vingt fioles de sang animal

Elle devint alors Morgenkriss et voici la prière qu’elle joignit en langage lupin à ses offrandes pour son dieu :

« Ô Goldrinn, toi qui m’a déjà tant donné autrefois, maintenant que je ne suis plus rien, reçoit ces offrandes en signe de ma plus profonde reconnaissance. Tu connais mes souhaits. Tu sais que je ne désire que te servir comme celle que je fut jadis et aider mon peuple à revenir chanter ton nom sous les lunes de ce monde. Je t’en prie, aide-moi ! Accorde-moi de donner aux apparitions de mes frères un peu plus de présence par un vrai corps et de vrais pouvoirs. Guide moi vers ton croc afin que je puisse en faire venir d’autres, comme il est dit dans le livre de mes notes d’autrefois et dans le journal de Gaedrin Lunecroc. J’aimerais aussi connaître ce pays merveilleux dont les livres parlent : Orneval. Ô Grand Loup Blanc, entend mon chant et guide moi vers mon destin ! »

Ces derniers sons gutturaux furent expulsés de sa gueule et se perdirent dans le silence de la nuit qui s’étendait au dessus des cime des arbres de la forêt de Pins Argentés. Le silence revint. Morgenkriss redevint Blanche et alla méditer dans sa chambre.

Le lendemain, toutes les offrandes avaient disparues.
A la place se trouvait une fiole contenant un liquide rougeâtre luisant et bouillonnant.